Parlons d'un sujet tabou: l’intelligence. Le dictionnaire Larousse définit ainsi l’intelligence: ensemble des fonctions mentales ayant pour objet la connaissance conceptuelle et rationnelle. On peut en déduire que les êtres humains ont des fonctions mentales et des fonctions physiques. Règle générale, la plupart des personnes que je côtoie ont peu de réticence à admettre que certaines de ces fonctions leur font défaut ou sont assez minimales. On entendra quelqu’un dire qu’il ne chante pas bien, qu’il ne peut courir des kilomètres, soulever des poids très lourds, tricoter un chandail ou marcher sur un fil de fer. Il est beaucoup plus rare d’entendre quelqu’un dire qu’il n’a pas l’intelligence nécessaire pour comprendre ceci ou cela.
Pourquoi en est-il ainsi ? Pourquoi une personne peut dire sans honte qu’elle n’a pas la force nécessaire pour déménager un piano mais qu’il lui est très pénible d’affirmer qu’elle n’a pas la capacité d’acquérir certaines connaissances conceptuelles et rationnelles. N’est-ce pas là un véritable tabou, une question évacuée, jamais discutée ?
Ce tabou est d’ailleurs largement entretenu par les politiciens et les médias en tous genres. À donner un poids égal aux opinions de tous et chacun sur tous les sujets imaginables, on vient indirectement affirmer que toutes ces personnes ont une connaissance conceptuelle et rationnelle de ces sujets qui peut contribuer à faire évoluer notre intelligence collective. Vous me direz que j’ai tout faux, qu’il ne s’agit que de connaître l’opinion de l’Homme de la rue sans prétendre que celle-ci peut contribuer à l’évolution de nos connaissances sur le sujet. Ça pourrait être vrai si les politiciens ne prêtaient pas une telle attention aux sondages de toutes sortes, à ce qui s’écrit dans les internets, ce qui se dit sur toutes les tribunes.
Nos démocraties modernes sont justement basées sur la prise en compte de tout ce bruit de fonds des opinions des uns et des autres. Comment nos démocraties peuvent-elles assurer une gouvernance intelligente de nos sociétés constituées de réseaux innombrables intriqués les uns dans les autres si on se base sur l’intelligence qu’a le citoyen moyen de ces phénomènes ? Je ne crois pas les démocraties capables de relever ce défi. Si mon analyse est juste, par quoi pourrait-on remplacer avantageusement nos démocraties acquises si durement ? C’est en grande partie le thème de la section Société de ce site Web. Réfléchir ensemble sur l’avenir de nos sociétés en difficulté.
En complément et soutien de cet article: Simple Thinking in a Complex World is a Recipe for Disaster